Développement en série de Engel

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En mathématiques, le développement en série de Engel d'un nombre réel strictement positif x {\displaystyle x} , moins connu que son développement en fraction continue mais étroitement lié[1], est son expression sous la forme :

x = 1 a 1 + 1 a 1 a 2 + 1 a 1 a 2 a 3 + {\displaystyle x={\frac {1}{a_{1}}}+{\frac {1}{a_{1}a_{2}}}+{\frac {1}{a_{1}a_{2}a_{3}}}+\dotsb }

où les a n {\displaystyle a_{n}} forment une suite croissante d'entiers naturels non nuls. Il y a unicité de la suite ( a n ) n 1 {\displaystyle (a_{n})_{n\geqslant 1}} .

Son appellation honore Friedrich Engel, qui l'a étudié en 1913[2] ; on l'utilise en théorie des nombres[3] et en théorie des probabilités[4].

Écriture condensée

On utilisera dans cet article la notation 1 a 1 + 1 a 1 a 2 + 1 a 1 a 2 a 3 + = ] a 1 , a 2 , a 3 , [ {\displaystyle {\frac {1}{a_{1}}}+{\frac {1}{a_{1}a_{2}}}+{\frac {1}{a_{1}a_{2}a_{3}}}+\dotsb =\left]a_{1},a_{2},a_{3},\dots \right[} [1].

De plus, lorsque x appartient à ] n , n + 1 [ {\displaystyle \left]n,n+1\right[} , on a toujours a 1 = a 2 = = a n = 1 {\displaystyle a_{1}=a_{2}=\dots =a_{n}=1} . On écrira donc plus simplement un réel x {\displaystyle x} non entier de cet intervalle sous la forme x = n + ] a n + 1 , a n + 2 , . . [ {\displaystyle x=n+]a_{n+1},a_{n+2},..[} n = x {\displaystyle n=\left\lfloor x\right\rfloor } est la partie entière de x {\displaystyle x}  ; on a alors a n + 1 2 {\displaystyle a_{n+1}\geqslant 2} .

Par exemple, le nombre π, situé entre 3 et 4, s'écrit π = ] 1 , 1 , 1 , 8 , 8 , 17 , 19 , 300 , [ {\displaystyle \pi =\left]1,1,1,8,8,17,19,300,\dots \right[} [5] = 3 + ] 8 , 8 , 17 , 19 , 300 , [ {\displaystyle =3+\left]8,8,17,19,300,\dots \right[} .

Premiers exemples

  • Un développement par une suite constante correspond à une série géométrique : ] a , a , a , [ = n = 1 1 a n = 1 a 1 {\displaystyle \left]a,a,a,\dots \right[=\sum _{n=1}^{\infty }{1 \over a^{n}}={\frac {1}{a-1}}} (pour tout entier a 2 {\displaystyle a\geqslant 2} ).
  • Celui du nombre e correspond au développement obtenu à partir de la série entière de l'exponentielle : e = n = 0 1 n ! {\displaystyle \mathrm {e} =\sum _{n=0}^{\infty }{\frac {1}{n!}}}  ; donc e = 2 + ] 2 , 3 , 4 , [ {\displaystyle \mathrm {e} =2+\left]2,3,4,\dots \right[} .
  • Plus généralement, e n = k = 0 1 n k k ! = 1 + ] n , 2 n , 3 n , [ {\displaystyle {\sqrt[{n}]{\mathrm {e} }}=\sum _{k=0}^{\infty }{\frac {1}{n^{k}k!}}=1+\left]n,2n,3n,\dots \right[} .
  • Le nombre p  premier 1 p # = 1 2 + 1 2 × 3 + 1 2 × 3 × 5 + = 0,705 23 {\displaystyle \sum _{p{\text{ premier}}}{1 \over p\#}={1 \over 2}+{1 \over {2\times 3}}+{1 \over {2\times 3\times 5}}+\ldots =0{,}70523\ldots } [6], somme des inverses des primorielles, est le nombre pour lequel la suite ( a n ) n 1 {\displaystyle (a_{n})_{n\geqslant 1}} est la suite croissante de nombres premiers.

Expression des sommes partielles

La somme partielle S N = 1 a 1 + 1 a 1 a 2 + + 1 a 1 a 2 a N {\displaystyle S_{N}={\frac {1}{a_{1}}}+{\frac {1}{a_{1}a_{2}}}+\dots +{\frac {1}{a_{1}a_{2}\dots a_{N}}}} peut s'écrire après factorisations sous les formes équivalentes suivantes :

1 a 1 ( 1 + 1 a 2 ( 1 + + 1 a N 1 ( 1 + 1 a N ) ) ) = 1 + 1 + 1 + 1 a N a 2 a 1 {\displaystyle {\frac {1}{a_{1}}}{\biggl (}1+{\frac {1}{a_{2}}}{\biggl (}1+\dots +{\frac {1}{a_{N-1}}}{\biggl (}1+{\frac {1}{a_{N}}}{\biggl )}{\biggl )}{\biggl )}={\frac {\displaystyle 1+{\frac {\displaystyle 1+\cdots {\frac {\displaystyle 1+{\frac {1}{a_{N}}}}{\displaystyle \cdots }}}{\displaystyle a_{2}}}}{\displaystyle a_{1}}}} , fraction continue ascendante,

à comparer avec le développement en fraction continue descendante classique : a 0 + 1 a 1 + 1 a 2 + + 1 a N {\displaystyle a_{0}+{\cfrac {1}{a_{1}+{\cfrac {1}{a_{2}+\dots +{\cfrac {1}{a_{N}}}}}}}}  ;

cette expression montre que S N {\displaystyle S_{N}} peut se calculer à partir de a 1 , , a N {\displaystyle a_{1},\dots ,a_{N}} avec N {\displaystyle N} divisions et N {\displaystyle N} additions (les additions consistant juste à ajouter 1).

Le nombre x = lim N S N {\displaystyle x=\lim _{N\to \infty }S_{N}} s'écrit alors 1 + 1 + 1 + a 3 a 2 a 1 {\displaystyle {\frac {\displaystyle 1+{\frac {\displaystyle 1+{\frac {\displaystyle 1+\cdots }{\displaystyle a_{3}}}}{\displaystyle a_{2}}}}{\displaystyle a_{1}}}} .

Construction du développement

La suite ( a n ) {\displaystyle (a_{n})} s'obtient par l'algorithme suivant, dû à Henry Briggs :

{ a 1 = 1 x + 1 x 1 = a 1 x 1 , { a 2 = 1 x 1 + 1 x 2 = a 2 x 1 1 , , { a n = 1 x n 1 + 1 x n = a n x n 1 1 , . . . {\displaystyle \left\{{\begin{matrix}{a_{1}=\lfloor {\frac {1}{x}}\rfloor +1}\\{x_{1}=a_{1}x-1}\end{matrix}}\right.,\left\{{\begin{matrix}{a_{2}=\lfloor {\frac {1}{x_{1}}}\rfloor +1}\\{x_{2}=a_{2}x_{1}-1}\end{matrix}}\right.,\qquad \dotso ,\left\{{\begin{matrix}{a_{n}=\lfloor {\frac {1}{x_{n-1}}}\rfloor +1}\\{x_{n}=a_{n}x_{n-1}-1}\end{matrix}}\right.,...}

De sorte que x n = ] a n + 1 , a n + 2 , [ {\displaystyle x_{n}=\left]a_{n+1},a_{n+2},\dots \right[} .

On obtient par exemple :

2 = 1 + ] 3 , 5 , 5 , 16 , 18 , 78 , 112 , [ {\displaystyle {\sqrt {2}}=1+\left]3,5,5,16,18,78,112,\dots \right[} , voir la suite A028254 de l'OEIS.

La liste des développements de Engel publiés dans l'OEIS se trouve ici.

Théorème — Le réel x est rationnel si et seulement si la suite ( a n ) n 1 {\displaystyle (a_{n})_{n\geqslant 1}} est constante à partir d'un certain rang.

Ceci permet de prouver l’irrationalité de nombres dont on connait un développement du type n = 1 1 a 1 a n {\displaystyle \sum _{n=1}^{\infty }{\frac {1}{a_{1}\dots a_{n}}}} comme e, e n {\displaystyle {\sqrt[{n}]{\mathrm {e} }}} , cosh 1 {\displaystyle \cosh 1} , sinh 1 {\displaystyle \sinh 1} , e 2 {\displaystyle \mathrm {e} ^{\sqrt {2}}} , n = 1 1 2 n 2 {\displaystyle \sum _{n=1}^{\infty }{\frac {1}{2^{n^{2}}}}} , p  premier 1 p # {\displaystyle \sum _{p{\text{ premier}}}{1 \over p\#}} [4].

Variante différenciant les rationnels des irrationnels

  • Le réel positif x {\displaystyle x} s'écrit aussi de manière unique sous la forme :
    x = 1 b 1 + 1 b 1 b 2 + 1 b 1 b 2 b 3 + + 1 b 1 b 2 b n + {\displaystyle x={\frac {1}{b_{1}}}+{\frac {1}{b_{1}b_{2}}}+{\frac {1}{b_{1}b_{2}b_{3}}}+\dotsb +{\frac {1}{b_{1}b_{2}\dotsm b_{n}}}+\dotsb } ,
    où les b n {\displaystyle b_{n}} forment une suite finie ou infinie croissante (au sens large) d'entiers strictement positifs, mais où l'on s'interdit une suite infinie constante à partir d'un certain rang.
  • De plus, ces entiers s'obtiennent en utilisant cette fois la fonction partie entière supérieure . {\displaystyle \lceil .\rceil }  :
    { b 1 = 1 x u 1 = b 1 x 1 , { b 2 = 1 u 1 u 2 = b 2 u 1 1 , , { b n = 1 u n 1 u n = b n u n 1 1 {\displaystyle \left\{{\begin{matrix}{b_{1}=\lceil {\frac {1}{x}}\rceil }\\{u_{1}=b_{1}x-1}\end{matrix}}\right.,\left\{{\begin{matrix}{b_{2}=\lceil {\frac {1}{u_{1}}}\rceil }\\{u_{2}=b_{2}u_{1}-1}\end{matrix}}\right.,\qquad \dotso ,\qquad \left\{{\begin{matrix}{b_{n}=\lceil {\frac {1}{u_{n-1}}}\rceil }\\{u_{n}=b_{n}u_{n-1}-1}\end{matrix}}\right.\dots }
    en convenant que si un u N {\displaystyle u_{N}} est nul, la suite d'entiers s'arrête à b N {\displaystyle b_{N}} .
  • Le réel x {\displaystyle x} est alors irrationnel si et seulement si la suite des b n {\displaystyle b_{n}} est infinie, et dans ce cas (par unicité) les deux constructions coïncident.
  • Lorsque x {\displaystyle x} est rationnel, la suite finie ( b 1 , , b N ) {\displaystyle (b_{1},\dots ,b_{N})} et la suite infinie stationnaire ( a 1 , a 2 , a 3 , . . . ) {\displaystyle (a_{1},a_{2},a_{3},...)} coïncident jusqu'au rang N 1 {\displaystyle N-1} , et pour tout n N {\displaystyle n\geqslant N} , a n = b N + 1 {\displaystyle a_{n}=b_{N}+1} .

Par exemple : 355 113 = 3 + ] 8 , 8 , 17 , 19 , 113 [ = 3 + ] 8 , 8 , 17 , 19 , 114 , 114 , [ {\displaystyle {355 \over 113}=3+\left]8,8,17,19,113\right[=3+\left]8,8,17,19,114,114,\dots \right[} (à comparer avec le développement de π ci-dessus).

Notons que cet algorithme fournit, pour tout rationnel strictement compris entre 0 et 1, un développement en somme de fractions égyptiennes de dénominateurs distincts. Cette écriture avait été vue par Fibonacci dans son Liber abaci (1202).

Formule de Stratemeyer

Cette formule donne le développement de Engel des nombres quadratiques de la forme : a a 2 1 {\displaystyle a-{\sqrt {a^{2}-1}}} a {\displaystyle a} est un entier 1 {\displaystyle \geqslant 1}  ;

la suite ( a n ) {\displaystyle (a_{n})} étant définie par a 1 = a {\displaystyle a_{1}=a} et a n + 1 = 2 a n 2 1 {\displaystyle a_{n+1}=2a_{n}^{2}-1} , on a : a a 2 1 = ] 2 a 1 , 2 a 2 , [ = n = 1 1 2 n a 1 a n {\displaystyle a-{\sqrt {a^{2}-1}}=\left]2a_{1},2a_{2},\dots \right[=\sum _{n=1}^{\infty }{\frac {1}{2^{n}a_{1}\dots a_{n}}}} [1].

Par exemple, 2 3 = ] 4 , 14 , 194 , 37634 , [ {\displaystyle 2-{\sqrt {3}}=\left]4,14,194,37634,\dots \right[} , voir la suite A003010 de l'OEIS.

Notes et références

  1. a b et c Pierre Liardet et Pierre Stambul, « Séries de Engel et fractions continuées », Journal de théorie des nombres de Bordeaux, t. 12, no 1,‎ , p. 37-68 (lire en ligne).
  2. (de) F. Engel, « Entwicklung der Zahlen nach Stammbruechen », dans Verhandlungen der 52. Versammlung deutscher Philologen und Schulmaenner in Marburg, , p. 190-191 ; traduction en anglais : http://oeis.org/A006784/a006784.pdf.
  3. (en) Daniel Duverney, Number Theory : An Elementary Introduction Through Diophantine Problems, World Scientific, coll. « Monographs in Number Theory » (no 4), , 335 p. (ISBN 978-981-4307-46-8, lire en ligne), p. 14-15 (ou : Théorie des nombres, Dunod, 2007).
  4. a et b Daniel Duverney, « Développement d'un nombre en série de Engel », Revue de Mathématiques Spéciales,‎ (lire en ligne).
  5. Voir la suite A006784 de l'OEIS.
  6. Voir la suite A064648 de l'OEIS.

Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Développement en série de Engel, sur Wikiversity

Articles connexes

Liens externes

  • (en) Eric W. Weisstein, « Engel Expansion », sur MathWorld
  • (en) Peter J. Grabner et Arnold Knopfmacher, « Arithmetic and metric properties of p-adic Engel series expansions », Publ. Math. Debrecen, vol. 63, no 3,‎ , p. 363-377 (lire en ligne)
  • icône décorative Arithmétique et théorie des nombres