Sinusite aspergillaire

Sinusite aspergillaire

Données clés

Traitement
Spécialité PneumologieVoir et modifier les données sur Wikidata
Classification et ressources externes
CIM-10 J32.9Voir et modifier les données sur Wikidata
eMedicine 863062

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Une sinusite aspergillaire (ou aspergillose nasosinusienne) est une infection chronique des sinus prenant parfois une forme forme pseudo-tumorale (mycétome), le plus souvent dans le sinus maxillaire.

Elle est causée par un champignon cosmopolite du genre des Aspergillus (genre décrit en 1729 par le botaniste italien Pier Antonio Micheli)[1]. Aspergillus fumigatus est l'espèce la plus souvent mise en cause dans cette infection de la muqueuse nasosinusienne.

C'est une aspergillose en nette augmentation et à l'évolution imprévisible. Elle nécessite un diagnostic précoce et une prise en charge rapide et adéquate, faute de quoi existe un risque de d'extension avec invasion de tissus adjacents (orbite, système nerveux central) susceptible de mettre en jeu le pronostic vital, surtout en cas d'immunodéficience[2].

Présentation clinique

La maladie peut être de très douloureuse à totalement asymptomatique. Ses symptômes sont en outre peu spécifiques ce qui rend le diagnostic souvent tardif ; mais le fait qu'un seul sinus soit touché doit attirer l’attention du clinicien[3].

Les diagnostic est confirmé par l’imagerie médicale (tomodensitométrie si possible) et parfois par des examens bactériologiques et mycologiques : la mise en évidence de filaments mycéliens d’Aspergillus confirme le diagnostic, mais les mises en culture restent le plus souvent négatives ; C'est alors l’examen histologique de prélèvements de la « balle » aspergillaire qui in fine révèle le plus souvent les filaments mycéliens)[4].

La chirurgie, parfois associée à un traitement antifongique traitent les cas de développement avancé de l'aspergillose[3].

Localisation, contexte anatomique

Schéma anatomique colorisé.
Sinus de la face : 1. Sinus frontaux, 2. Sinus ethmoïdaux, 3. Sinus sphénoïdaux, 4. Sinus maxillaires.

Les sinus sont des cavités aériques au sein des os de la face. Le sinus maxillaire est développé au sein de l'os maxillaire, sous l'orbite et au-dessus des dents supérieures ; il est le siège de la majorité des sinusites aspergillaires.

Epidémiologie

Les infections fongiques du nez et des sinus paranasaux étaient autrefois considérées comme relativement rares, mais un nombre important de rhino-sinusite chronique diagnostiquée s'avèrent in fine être une sinusite fongique. Selon Loidolt et al. (1989)[5].

La fréquence de ces infections semble en outre avoir augmenté au cours des dernières décennies[6].

Causes

La rhinosinusite aspergillaire (maxillaire notamment) peut avoir la Dentisterie comme origine (environ 30 % des cas, par exemple après un traitement endodontique ou une avulsion dentaire[7]. Dans ce cas la cause est souvent une irruption de pâte d’obturation canalaire dans le sinus maxillaire, via une fistule bucco-sinusienne, susceptible d'induire une forme invasive pseudo-tumorale[7]. Plus de la moitié des cas d'aspergillose non envahissante du sinus maxillaire sont associés à la présence dans les sinus de ciment canalaire propulsé par voie endodontique[3] ;

  • Une hypothèse est que l’oxyde de zinc contenu dans ce ciment pourrait promouvoir l’infection, car le zinc est un facteur de croissance connu pour Aspergillus fumigatus[8]. * Une autre hypothèse est qu'un œdème et une hyperhémie des tissus mous induites par le zinc pourrait inhiber la fonction épithéliale mucociliaire (nettoyage des muqueuses par le mucus et les cils), ce qui expliquerait la teneur en phosphate de calcium et de sulfate de calcium trouvés dans les sinus infectés, sous forme de concrétions calcaires, en plus de restes de matériel d’obturation)[9].

Une contamination des sinus par Aspergillus peut aussi se faire par l'air inhalé.

Legent & al. ont rapporté (en 1980) que des formes endémiques de la maladie, existent, par exemple au Soudan (avec prédominance d’Aspergillus flavus[10].

Divers facteurs prédisposants ou de risques de sinusite aspergillaire sont cités par la littérature médicale [3] :

  • Pour les formes invasives chroniques indolente, ce sont l'immunodéficience, ainsi que l’exposition à l’eau de mer, les séquelles d'un traumatisme maxillofacial (Une déviation de la cloison nasale (qui peut favoriser l'anaérobiose dans un sinus), les traitements médicamenteux en spray nasal et la radiothérapie[3]. Aspergillus fumigatus est alors le plus souvent en cause[3].

La présence de polypes est souvent associé à ce type de sinusite, sans que l'on sache s'il s'agit d'une cause ou d'une conséquence.

Facteurs de risques

Germes en cause

Image en noir et blanc, photographie prise en microscopie électronique, montrant la disposition caractéristique des conidiophores.
Aspergillus fumigatus en microscopie électronique.

Aspergillus fumigatus est un champignon saprophyte du sol, très courant, et l'un de ceux relargant le plus de spores dans l'air[12]. Les spores, de 2 à 3 µm de diamètre, sont suffisamment petits pour progresser dans l'arbre respiratoire jusqu'aux alvéoles pulmonaires, et assez nombreux pour qu'un être humain en inhale plusieurs centaines par jour[12]. Les spores sont normalement éliminées par le système immunitaire et ne sont pathogènes que dans certains cas.

Si tous les champignons du genre Aspergillus sont potentiellement pathogènes (notamment A. flavus, A. terreus, A. niger et A. nidulans), Aspergillus fumigatus est responsable de 90 % des infections pulmonaires chez l'humain[12] et de la plupart des sinusites aspergillaires chez les patients immunocompétents. A. flavus est cependant plus fréquent dans les sinusites des patients immunodéprimés[13].

Manifestations cliniques

La gravité varie avec l'état général du patient, et notamment la présence d'une immunodépression ou chez la personne âgée.

On distingue plusieurs formes cliniques, qualifiées de

  • formes invasives chroniques (indolentes, aiguës fulminantes, pseudo-tumorales, parfois associée à une lyse osseuse) ; dans ces cas, l'agent fongique croît à l'intérieur de tissus (os, vaisseaux, muqueuse)[14] ; La colonie fongique peut être non-douloureuse et faire évoquer, à tort, un processus néoplasique[15] ;
  • formes non-invasives (la champignons croît dans le mucus ou sur la muqueuse)[14] et peut prendre la forme de « balles fongiques » ou « truffes aspergillairse » [3].

Les signes cliniques sont ceux d'une sinusite chronique, avec signes et symptômes d'obstruction nasale, douleur à la palpation du sinus, rhinorrhée parfois fétide et parfois présence de polypes nasaux[16].

Si la mycose est déjà étendue, rarement, on peut observer une ethmoïdite aiguë (infection des cellules du labyrinthe ethmoïdal, situé entre l’orbite en dehors, la partie haute des fosses nasales en dedans et la base du crâne en haut), avec éventuel abcès oculaire. Cette ethmoïdite, si elle n'est pas traitée peut affecter la vue (voire le pronostic vital) par le biais de complications endocrâniennes[14].

On observe parfois (rarement) une inflammation cutanée de contiguïté[17].

Prévention, dépistage

Les sinusites fungiques pouvant être très invasives chez les immunodéprimés[3], L. Chikhani suggère en 1988 de « réaliser chez ces patients, ou avant tout traitement immunosuppresseur, un dépistage systématique des corps étrangers (pâte dentaire) et des sinusites fungiques par un cliché panoramique et/ou un cliché avec incidence de Blondeau »[18], et de fortement sensibiliser les chirurgiens dentistes et stomatologistes« au problème de dépassement de pâte dentaire et des conséquences potentielles afin d’utiliser des traitements endodontiques plus sûrs et adaptés »[18].

Autres types d'aspergilloses

Outre les sinusites aspergillaires (locale, qui ne touchent que la cavité sinusienne, initialement au moins), on distingue :

Références

  1. (la) Pier Antonio Micheli, Nova plantarum genera, Florence, (lire en ligne), p. 212
  2. (en) C. J. Clancy et M. H. Nguyen, « Invasive sinus aspergillosis in apparently immunocompetent hosts », Journal of Infection, vol. 37, no 3,‎ , p. 229–240 (ISSN 0163-4453, DOI 10.1016/S0163-4453(98)91921-1, lire en ligne, consulté le )
  3. a b c d e f g et h Delbet C., Barthélémy I., Teitelbaum J., Devoize L. (2011) [ Mycoses aspergillaires des sinus maxillaires]. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Médecine buccale, 28-275-I-10.
  4. Fabio Costa, Francesco Polini, Nicoletta Zerman et Massimo Robiony, « Surgical treatment of Aspergillus mycetomas of the maxillary sinus: Review of the literature », Oral Surgery, Oral Medicine, Oral Pathology, Oral Radiology, and Endodontology, vol. 103, no 6,‎ , e23–e29 (ISSN 1079-2104, DOI 10.1016/j.tripleo.2006.12.015, lire en ligne, consulté le )
  5. D. Loidolt, H. Mangge, M. Wilders-Truschnig et F. Beaufort, « In vivo and in vitro suppression of lymphocyte function in Aspergillus sinusitis », Archives of Oto-Rhino-Laryngology, vol. 246, no 5,‎ , p. 321–323 (ISSN 0302-9530 et 1434-4726, DOI 10.1007/bf00463585, lire en ligne, consulté le )
  6. P. Karthikeyan et V. Nirmal Coumare, « Incidence and presentation of fungal sinusitis in patient diagnosed with chronic rhinosinusitis », Indian Journal of Otolaryngology and Head and Neck Surgery: Official Publication of the Association of Otolaryngologists of India, vol. 62, no 4,‎ , p. 381–385 (ISSN 0973-7707, PMID 22319697, PMCID 3266098, DOI 10.1007/s12070-010-0062-0, lire en ligne, consulté le )
  7. a et b L. Naha, K. Nadour, B. Hemmaoui, N. Errami, I. En-Nafaa, B. Bouaity et B. Lmimouni, « Sinusite aspergillaire d’origine dentaire dans sa forme pseudo-tumorale », Journal de Mycologie Médicale / Journal of Medical Mycology, Elsevier BV, vol. 24, no 2,‎ , p. 171-174 (ISSN 1156-5233, DOI 10.1016/j.mycmed.2014.01.061, lire en ligne).
  8. Edward Odell et Christoph Pertl, « Zinc as a growth factor for Aspergillus sp. and the antifungal effects of root canal sealants », Oral Surgery, Oral Medicine, Oral Pathology, Oral Radiology, and Endodontology, vol. 79, no 1,‎ , p. 82–87 (ISSN 1079-2104, DOI 10.1016/s1079-2104(05)80079-4, lire en ligne, consulté le )
  9. Magda Mensi, Stefano Salgarello, Gabriele Pinsi et Michela Piccioni, « Mycetoma of the maxillary sinus: endodontic and microbiological correlations », Oral Surgery, Oral Medicine, Oral Pathology, Oral Radiology, and Endodontology, vol. 98, no 1,‎ , p. 119–123 (ISSN 1079-2104, DOI 10.1016/j.tripleo.2003.12.035, lire en ligne, consulté le )
  10. Legent F, Desnos J, Beauvillain C, Trichereau G, Julien JM. Aspergilloses sinusiennes. J Fr Oto-Rhino-Laryngol 1980;29:39-49.
  11. B Peral-Cagigal, LM Redondo-Gonzalez et A. Verrier-Hernandez, « Invasive maxillary sinus aspergillosis: A case report successfully treated with voriconazole and surgical debridement », Journal of Clinical and Experimental Dentistry,‎ , e448–51 (ISSN 1989-5488, DOI 10.4317/jced.51571, lire en ligne, consulté le )
  12. a b et c Latgé et coll 2002.
  13. (en) Marcia Ramos-e-Silva, Cíntia Maria Oliveira Lima, Regina Casz Schechtman, Beatriz Moritz Trope et Sueli Carneiro, « Systemic mycoses in immunodepressed patients (AIDS) », Clinics in Dermatology, Elsevier BV, vol. 30, no 6,‎ , p. 616-627 (ISSN 0738-081X, DOI 10.1016/j.clindermatol.2012.01.008, lire en ligne).
  14. a b et c L. Naha, M. Elakhiri, B. Hemmaoui et R. Tagajdid, « Ethmoïdite aspergillaire compliquée d’un abcès orbitaire », Journal de Mycologie Médicale, vol. 23, no 2,‎ , p. 136–139 (DOI 10.1016/j.mycmed.2013.04.004, lire en ligne, consulté le )
  15. W Mneimneh, D Cazals-Hatem, I Mosnier et C Bellier, « Indolent invasive sphenoid aspergillosis mimicking a neoplastic process », Histopathology, vol. 49, no 2,‎ , p. 210–211 (ISSN 0309-0167 et 1365-2559, DOI 10.1111/j.1365-2559.2006.02388.x, lire en ligne, consulté le )
  16. Nukhbat Ullah Awan, Khalid Muneer Cheema, Fatima Naumeri et Samina Qamar, « Allergic Fungal rhino-sinusitis frequency in chronic rhino-sinusitis patients and accuracy of fungal culture in its diagnosis: Allergic Fungal rhino-sinusitis », Pakistan Journal of Medical Sciences, vol. 36, no 3,‎ (ISSN 1681-715X et 1682-024X, PMID 32292470, PMCID PMC7150416, DOI 10.12669/pjms.36.3.1661, lire en ligne, consulté le )
  17. H. Lefranc, C. Brugière, L. Plisson et F. Comoz, « Inflammation cutanée de contiguïté secondaire à une sinusite aspergillaire », Annales de Dermatologie et de Vénéréologie, vol. 145, no 10,‎ , p. 593–597 (DOI 10.1016/j.annder.2018.06.006, lire en ligne, consulté le )
  18. a et b Chikhani L (1988) Dépassement de pâte dentaire dans le sinus maxillaire, une complication qui peut être mortelle : vers une nouvelle responsabilité professionnelle. Aspects médicolégaux et incidences pratiques. Rev Fr Domm Corp 1998;1:11-20.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Jean-Paul Latgé, « Aspergillus fumigatus and Aspergillosis », Clinical Microbiology Reviews, American Society for Microbiology, vol. 12,‎ , p. 310-350 (ISSN 0893-8512, lire en ligne).
  • Fabio Costa, Francesco Polini, Nicoletta Zerman et Massimo Robiony, « Surgical treatment of Aspergillus mycetomas of the maxillary sinus: Review of the literature », Oral Surgery, Oral Medicine, Oral Pathology, Oral Radiology, and Endodontology, vol. 103, no 6,‎ , e23–e29 (ISSN 1079-2104, DOI 10.1016/j.tripleo.2006.12.015, lire en ligne, consulté le )
  • J. -J. Braun, G. Pauli, P. Schultz et A. Molard, « La sinusite fongique allergique (SFA) : « équivalent nasosinusien » de l’aspergillose bronchopulmonaire allergique (ABPA) ? », Revue Française d'Allergologie et d'Immunologie Clinique, vol. 47, no 4,‎ , p. 298–304 (ISSN 0335-7457, DOI 10.1016/j.allerg.2007.04.002, lire en ligne, consulté le )

Articles connexes

Liens externes

  • « Aspergillose », sur Institut Pasteur, (consulté le ).
  • Association française des enseignants de parasitologie et mycologie (ANOFEL), « Aspergilloses et autres champignons filamenteux opportunistes », sur Campus de Parasitologie-Mycologie (consulté le ).
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